Il n’était vraiment pas besoin d’être un sorcier pour imaginer, voire redouter la suite que pouvaient prendre les événements après le putsch du 05 septembre 2021. Il aurait simplement suffi de jeter ne serait-ce qu’un regard furtif dans le passé plus ou moins récent de la Guinée, de notre passé.
A côté de hauts faits héroïques de nos devanciers, il y a aussi eu des pages particulièrement sombres dans notre histoire. Les événements tragiques du 28 septembre 2009, dont le procès tient aujourd’hui en haleine le monde entier, suffiraient à eux-seuls pour illustrer certaines de ces pages. Et pourtant, comme une sorte de malédiction divine, nous ne parvenons toujours pas à nous inspirer de ce passé afin de nous extirper définitivement du mal. Pour preuve…
Comme le coup d’Etat perpétré par le Conseil national pour la démocratie et le développement (CNDD) du Capitaine Moussa Dadis Camara, il y a eu dans un premier temps une relative période de grâce. Pendant laquelle, l’espoir se le disputait au triomphalisme chez de nombreux compatriotes. Très vite, dans le cas du Comité national du rassemblement pour le développement (CNRD du Colonel Mamadi Doumbouya, ont surgi après une relative trêve les premières questions qui fâchent, intimement liées au retour à l’ordre constitutionnel.
En interdisant les manifestations publiques, la Transition du Colonel-président a peut-être voulu couper l’herbe sous les pieds d’irréductibles contestataires. Si tout au moins, elle s’était inspiré du passé, elle se serait peut-être vite compte que la stratégie ne pouvait nullement prospérer, que tôt ou tard elle prendrait rapidement du plomb dans l’aile. Quoiqu’interdites, n’est-ce pas qu’elles continuent hélas de produire plus ou moins les mêmes effets que sous le régime du Professeur-président !
Pour ceux de nos compatriotes qui pensaient que c’en était définitivement terminé de la comptabilité macabre des victimes des manifestations de rue, le désenchantement ne peut être que plus grand à présent. Le sang de guinéens continue hélas de couler lors de manifestations de rue, avec leurs corollaires de blessés graves et de destructions de biens publics et privés.
L’homme fort du 05 septembre avait pourtant promis qu’aucune goutte de sang de guinéen ne coulerait en Guinée à compter de sa prise de pouvoir. Que s’est-il donc passé pour empêcher ce noble engagement de se réaliser ? Difficile à dire. Mieux que quiconque, le Colonel Mamadi Doumbouya est certainement le mieux placé pour donner des explications à ce sujet.
En attendant de parvenir à cette hypothétique épreuve, le débat sur l’avenir de la Guinée est de nouveau posé. Si et seulement s’il pouvait permettre de ressortir les causes profondes d’une déchirure qui n’est visiblement pas près de s’arrêter, c’en serait peut-être terminé des échecs et autres fiascos répétitifs dans notre pays. A ce sujet, on ne le répétera jamais assez, toute sortie envisageable de crise ne peut passer que par le dialogue. Ailleurs, sous d’autres cieux, à des moments terribles de leur histoire, des peuples africains ont réussi à se ressaisir afin de se parler, se confesser, se pardonner afin de pouvoir donner une réelle chance à leur avenir commun et surtout à celui de leurs pays.
Panafricanistes dans l’âme qu’ils ont toujours été, les guinéens ne devraient aucunement se gêner aujourd’hui à emprunter des canaux de discussions à des frères africains ayant plus ou moins réussi là où ils peinent visiblement à se sortir depuis des décennies. Le plus tôt, à notre humble avis, serait mieux afin d’arrêter définitivement l’hémorragie.

A retrouver dans l’Edito

du Standard 557