Pendant plusieurs semaines, des guides religieux guinéens ont tenté de réussir ce que des pessimistes pensaient être de l’ordre de l’impossible. Dans l’hypothèse d’une nécessité impérieuse de retour à l’ordre constitutionnel, cette réussite était pourtant des plus souhaitables. Aujourd’hui qu’elle a été sérieusement compromise avec le quasi-retour aux habituelles confrontations dans la rue depuis un peu plus d’une décennie, n’est-ce pas que la Guinée est de nouveau au bord d’une impasse politique ?

Opter aujourd’hui pour la politique de l’autruche desservirait amplement la cause démocratique de notre cher pays, la Guinée. Si l’une des causes nobles du coup d’Etat du 5 septembre 2021 était de rompre avec un certain passé, qui flirtait dangereusement avec l’instabilité permanente, il y a lieu de constater avec la reprise des manifestations de rue que le ver n’a hélas pas encore quitté le fruit. Il y a donc lieu de s’en inquiéter, voire même s’en préoccuper au plus haut point.

D’aucuns sur l’échiquier planétaire ont beau vanter les vertus du dialogue, c’est à croire qu’il n’a jamais été acquis d’avance dans le contexte particulier de notre pays, surtout au niveau de son échelle politique. Les faits étant têtus, ils sont hélas encore là pour se rappeler aux mauvais souvenirs des guinéens.

Durant une décennie sous le régime déchu du Professeur-président, l’échiquier politique guinéen a été constamment perturbé, malmené, voire désorienté, avec en toile de fond une course effrénée au pouvoir. L’issue, on la connait évidemment, ce fut le coup de force militaire survenu le 5 septembre 2021. S’il n’a pas eu le mérite de mettre tout le monde d’accord, il a tout de même entretenu un réel espoir de changement de cap.
Sachant peut-être qu’il marchait sur des œufs, le nouvel homme fort du pays s’est vite engagé à rendre le pouvoir au terme de sa Transition. Mais comme un acte prémonitoire, il a averti que pour ne pas que cette Transition en appelle à une autre, il faudrait qu’elle soit convenablement et correctement menée. Le Colonel Mamadi Doumbouya n’a certainement pas eu tort de le dire. Sauf qu’au-delà des mots, il n’avait peut-être pas imaginé l’ampleur et la complexité de la tâche pour y parvenir.

A l’allure où vont les choses, il y a tout lieu de se faire des soucis parce que la Guinée est tout simplement en train de renouer avec les vieux démons du passé, surtout ceux de la méfiance, de la suspicion, de la division et de la mésentente. Sous le régime Alpha Condé, de nombreuses et interminables manifestations de rue n’y ont rien pu. Pourrait-on espérer une issue différente aujourd’hui, alors que le pays vit sous une Transition militaire confrontée de plus en plus à des difficultés d’approche ? Cette question mérite sans nul doute d’être posée.

Il se peut qu’en y apportant une réponse judicieuse, voire adéquate, les tenants actuels du pouvoir parviennent à vaincre ce qui parait être un signe indien. A défaut, c’est à une nouvelle impasse politique à laquelle assisteront de nombreux guinéens qui pensent qu’au-delà de la course effrénée au pouvoir, il y a la nécessite impérieuse de vivre en paix. C’est pourquoi, il conviendrait d’en sortir vaille que vaille, et le plus tôt possible serait mieux.

Moussa Soumah

In Standard 558