De un ! Et de deux ! Il ne s’agit visiblement pas d’un oubli mais d’un choix délibéré. Par deux fois en tout cas, et en l’espace de quelques jours seulement, le Président de la Transition, le Colonel Mamadi Doumbouya, a eu l’opportunité de s’exprimer là-dessus. D’abord, à la majestueuse tribune du monde, celle des Nations-Unies. A l’occasion ensuite de la commémoration de l’accélération de notre pays, la Guinée, à la souveraineté internationale. Par rapport à ces deux fois, le Président de la Transition était impatiemment attendu, surtout par tous ses compatriotes qui caressent l’espoir d’un retour à l’ordre constitutionnel. Et c’est bien de cela qu’il s’agit, c’est-à-dire le retour à l’ordre constitutionnel. Pourquoi urgerait-il tant d’en parler ?  Et pourquoi était-il particulièrement attendu à ces deux occasions-là par certains de ses compatriotes ?

Pour répondre à la première question, nous estimons que c’est fondamentalement à cause de la durée de la Transition, fixée sous l’égide de la CEDEAO à deux années. Pendant que la toute première court inexorablement à sa fin, il n’y a rien qui présage d’une réelle volonté de retour à l’ordre constitutionnel. Evidemment que si certains préalables à un tel retour avaient d’ores et déjà été mis à exécution, il n’y aurait nullement lieu de se poser tant de questions. Et le minimum de ces préalables, nous pensons, aurait été que les différentes parties à la Transition s’accordassent ne serait-ce que sur les principales règles de jeu. En lieu et place, hélas, l’on assiste à un dialogue de sourds, avec en toile de fond la résurgence d’une nouvelle crise de confiance.

Et pour ne rien arranger du tout, le Président de la Transition semble s’affairer à toute autre chose, à dérouler tranquillement son programme de « refondation de l’Etat » et procéder à des « reformes institutionnelles ». Peu lui importerait apparemment si ses détracteurs pensent que ce ne saurait être là la vocation d’une Transition impartie dans le temps.

Pour ce qu’il est de la seconde question posée plus haut, il y a visiblement beaucoup de raisons qui ont amené certains de nos compatriotes, y compris certainement des opinions extérieures au pays, à penser que les deux occasions susmentionnées étaient favorables à un exercice qui aurait pu être bénéfique. Celui pour le chef de l’Etat guinéen de faire une sorte de point à presque mi-parcours d’une Transition partie pour durée deux années au total. Pas seulement parce que la CEDEAO l’aurait souhaité, mais parce qu’il y a que le Colonel Mamadi Doumbouya s’y est engagé plus d’une fois. Allant jusqu’à dire à son porte-parole du Gouvernement du Premier ministre de Dr Bernard Goumou, qu’en cas de glissement de calendrier, il ne passerait pas un jour de plus à la tête de la Transition. D’aucuns, parmi les observateurs les plus avertis de la scène politique guinéenne soutiennent par ailleurs que si le Colonel avait saisi la communauté internationale au sujet du retour à l’ordre constitutionnel en Guinée, il n’aurait pas éprouvé trop de difficultés à se faire entendre, se faire solidement appuyé dans une démarche des plus louables. Et s’il avait choisi à l’occasion de sa récente adresse à la nation de réaffirmer aux uns aux autres sa ferme détermination à ne pas se faire distraire par les chants des sirènes, pas mal de ses détracteurs auraient peut-être choisi de baisser la garde. Mais, il n’en fut rien. Et tout semble se dérouler présentement en Guinée comme si nous n’étions pas dans une Transition aux pas comptés. Quoi de plus logique alors que l’atmosphère politique ne soit plus du tout vivable, parce que dorénavant faite de tensions, de suspicions et de crise de confiance.

Vous avez dit : Scepticisme politique ambiant !

Nous y sommes hélas !

Le Standard 578