Un député, propriétaire d’une société minière stratégique, a été condamné à mort vendredi à Kinshasa par la justice militaire, notamment pour « participation au mouvement insurrectionnel M23 » et « trahison », en République démocratique du Congo.

La peine de mort est souvent prononcée en RDC, mais n’est plus appliquée depuis 20 ans et est systématiquement commuée en réclusion à perpétuité.

En août, le parquet avait requis la prison à vie contre Édouard Mwangachuchu, 70 ans, élu de Masisi, dans la province troublée du Nord-Kivu (est de la RDC).

La Haute Cour militaire n’a accordé aucune circonstance atténuante au condamné, qui n’était pas présent au prononcé de la sentence, comme l’a constaté une équipe de l’AFP. Il a été reconnu coupable de « détention illégale d’armes et munitions de guerre », de « participation au mouvement insurrectionnel M23 » et de « trahison », a indiqué le général Robert Kalala, président de la Haute Cour.

Le M23, pour « Mouvement du 23 mars », est une rébellion à majorité tutsie qui, avec le soutien du Rwanda selon Kinshasa, s’est emparée de vastes pans de territoire au Nord-Kivu depuis fin 2021.

M. Mwangachuchu a été arrêté le 1er mars à Kinshasa, détenu d’abord à Makala, la principale prison de la capitale congolaise, puis transféré à la prison militaire de Ndolo, où se sont tenues la trentaine d’audiences de son procès.

Son coaccusé, Robert Muchamalirwa, un capitaine de police poursuivi pour « violation d’ordres », a été acquitté et le tribunal a ordonné sa libération immédiate.

La défense de M. Mwangachuchu, qui avait plaidé pour l’acquittement, a annoncé son intention de faire appel devant la Cour suprême. S’adressant à la presse, Me Thomas Gamakolo a dénoncé la « décision inique, motivée par des considérations étrangères à la loi ».

Selon lui, il s’agit « d’un procès fondé sur la haine ethnique et les déductions ». « Nous n’avons jamais pu prouver que M. Mwangachuchu avait des liens avec le Rwanda », mais « en raison de sa ‘tutsité’, nous avons établi une présomption de culpabilité », a déclaré M. Gamakolo.

– Des liens étroits avec le Rwanda –

« Il est très difficile aujourd’hui dans notre pays de vivre ou d’exister en tant que Tutsi », a déploré l’avocat.

Les poursuites contre M. Mwangachuchu ont été déclenchées lorsque les rebelles du M23, qui s’étaient emparés de la ville minière de Rubaya (Nord-Kivu), ont été « délogés par les indigènes locaux organisés dans un mouvement d’autodéfense », a expliqué la Haute Cour.

Ces derniers avaient alors découvert une cache d’armes sur le site de Bibatama appartenant à la société minière Bisunzu (SMB), propriété de M. Mwangachuchu, a-t-on ajouté lors de la lecture du verdict.

Dans son réquisitoire final, la défense avait soutenu que les accusés étaient « des personnes se faisant appeler ‘paysans hutu’ et des membres du groupe armé Nyatura » qui « affirmaient avoir découvert une cache d’armes » sur le site minier.

Vendredi, la cour est également longuement revenue sur un certificat de test Covid réalisé par M. Mwangachuchu à Kigali en mai 2021, arguant qu’il s’agissait d’une preuve des « liens étroits » du député congolais avec « le Rwanda, le pays qui a attaqué la RDC ».

Il a également été affirmé que les minerais produits par sa société étaient « envoyés au Rwanda » et qu’un document trouvé dans son coffre-fort indiquait qu’il possédait « des biens immobiliers au Rwanda » et qu’il était « très préoccupé par le développement du Rwanda ».

Lors du procès, M. Mwangachuchu a affirmé avoir été menacé par le M23 et les autorités de sécurité rwandaises.

Il était apparu malade et visiblement affaibli lors des audiences. Les demandes de libération provisoire pour raisons de santé ont été rejetées.

Africanews